"un petit mot sur mon blog"


"un petit mot sur mon blog"

Psyblog a posé son stylo le 5 juin dernier. Il est parti "ailleurs", pour une autre vie plus sereine et lumineuse.
Ce blog était pour lui une belle aventure d'écriture, de réflexion, d'émotion et de partage. Les commentaires de ses nombreux lecteurs en sont un témoignage chaleureux. Vos derniers mots tout particulièrement...
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lundi 21 novembre 2011

Évaluer la dangerosité d'un futur délinquant ????




Le viol et l'assassinat de la jeune Agnès relance la polémique : Les événements étaient-ils prévisibles ? La récidive du jeune mis en cause était-elle prévisible ? Pourquoi les experts n'ont-ils"rien" vu, du moins pas la possible dangerosité du jeune Mathieu ?
De l'acceptation d'un fatalisme à la quasi-demande de rétablissement de la peine de mort, les réponses sont souvent désordonnées, comme si l'émotion prenait une fois de plus le pas sur la réflexion. Comme c'est le cas toujours dans toutes ces "affaires".

La Justice -que je connais un peu- semble avoir appliqué la Loi. Celle qui exprime la primauté (pour une fois) de la liberté sur l'enfermement, d'autant qu'il s'agit d'un mineur. Le suivi judiciaire, si j'ai bien compris, semble avoir été assuré conformément à la loi (encore que ! J'avais écrit un billet il y a longtemps sur le peu de cas que faisait la Justice, finalement, de ces "suivis thérapeutiques" qu'elle ordonnait).

L'établissement et la direction de l'établissement scolaire ? Ils n'étaient pas au courant, seulement qu'il y avait eu incarcération préventive en attendant un jugement. Et ils auraient connu la raison de cette incarcération qu'ils n'auraient pas accepté ce jeune. Heureusement sans doute, qu'ils n'étaient pas au courant de tout, certes pas pour la jeune Agnès, mais pour les milliers de jeunes qui chaque année trouvent refuge dans un établissement et qui s'en sortent bien et qui ne récidivent jamais.

Les experts psychiatres et psychologues se sont-ils "trompés" ? La polémique enfle déjà. Comme s'il était possible de répondre OUI sans aucune forme de procès.
Ils se seraient trompés sur quoi, d'ailleurs ? Sur des prévisions quant à la dangerosité à venir d'un homme ? Ils auraient dû affiner -certifier ?- un pronostic au vu de leur diagnostic ? Ils auraient dû conclure à l'enfermement dont on n'aurait jamais pu déduire la non ou la dangerosité de l'enfermé ? Or, autant il est impossible de mettre les enfants de trois ans en case au motif de leur propension à devenir délinquant ou pas ou un petit peu à l'avenir, autant il est impossible de le faire à un âge plus avancé.
C'est sans aucun doute la personnalité d'un individu, qui peut donner à dire et à prédire quelque peu ses actes à venir, du moins la tendance vers laquelle il peut se diriger, mais aussi son histoire, la somme de ses actes et activités passés.
Il y a certes, en matière psychiatrique, des tableaux inquiétants qui peuvent amener à penser à une possible dérive vers la violence, et si certains ne retiendraient bien que le terme "violence", je retiens moi le terme "possible". Ou alors enfermons à vie tous les schizophrènes, tous les alcooliques, les chauffards et les jeunes voleurs de bonbons.
Je crois que ce serait faire un mauvais procès aux psys que de les accuser de n'avoir rien vu. La psychologie, comme la psychiatrie, n'est pas une science "exacte". C'est une science humaine, de celles qui, si elles ont accumulé un certain savoir sur le fonctionnement de l'humain, n'en sont pas moins parfois démunies quant aux prévisions de comportement des uns ou des autres.

Il y a une chose que je ne comprends pas bien cependant, et contre laquelle je m'élèverais volontiers : Pourquoi avoir laissé (et là ce serait à la Justice, mais aussi aux psys mandatés par elle de répondre) ce jeune s'inscrire dans un établissement où il y avait des jeunes filles ? C'est vrai. Ça je ne comprends pas. Et sans doute s'il y a eu erreur, au moins par manquement de vigilance, je crois qu'elle est là. Qu'au moins il ait été pris quelques précautions pour ne pas "tenter" ce jeune, du moins ne pas le placer dans des situations où... la récidive était possible.

Je pense bien entendu à Agnès, à sa famille et à son entourage, pour qui cela est terrible à vivre. Et je comprends bien leur révolte. Mais je suis une fois de plus bien en peine pour appuyer sur le bouton de l'emprisonnement sur simple suspicion d'une récidive.

800 mineurs sont actuellement incarcérés en France, 4000 mineurs vont chaque année en prison. S'agit-il, sur simple présomption de culpabilité à venir, d'en emprisonner d'autres plus nombreux encore ? On aurait aussi pu l'incarcérer en "Centre éducatif fermé". Mais Roseinsweig -juge des enfants au tribunal pour enfants de Nanterre- le dit lui-même "Oui, on aurait pu, mais tout systématisme en Justice est idiot". Oui, on aurait pu.
"Tout mineur auteur d'agression sexuelle grave devra désormais être placé en Centre éducatif fermé", c'est ce que viennent de décider les ministres en charge de ce dossier (Au demeurant je me demande où est la limite entre le "grave" et le "pas grave" ????), ajoutant que ces jeunes ne devront plus être accueillis dans des collèges ou lycées sans information complète à l'établissement en question (autant le dire : ces jeunes ne trouveront plus de collège ni de lycée).
S'ajoute à cela une approche multi-disciplinaire de l'évaluation de la dangerosité d'un individu.
Bien.

J'en viens cependant à l'une des plaies de l'éducation, ou de l'Education avec un grand E. J'en ai déjà parlé ici mais je vais recommencer : Tant que l'on (collectivement) acceptera / supportera les incivilités de chaque jour, tant que l'on (toujours collectivement) ne donnera pas aux établissements scolaires le "droit" de contrôler, de sévir, voire d'exclure, tant qu'il faudra remplir une doléance en trois exemplaires, qu'il faudra réunir un conseil pour simplement dire la loi ou la règle, tant que les adultes éducateurs se verront privés des moyens de la faire respecter, les petites délinquance se transformeront éventuellement en grandes.
Je condamne bien entendu le geste de ce jeune à l'égard de la jeune Agnès. C'est horrible, c'est terrible, ça ne devrait pas exister. Et sans vouloir pour autant nier ce que l'on pourrait appeler les déviances ou les pathologies psychiques (ce dont manifestement est atteint le présumé meurtrier), le comportement des adultes me semblent tout autant à condamner. Parce que laxisme.
Qui met un pied dans la délinquance en met les deux s'il n'est pas condamné pour ce petit pas. La non-condamnation devient une autorisation.

Je ne prétends pas loin de là faire le tour de cette affaire en un tour de clavier. C'est simplement ma vision des choses. Ni à chaud ni à froid. A tiède...

Je sais, c'est une note qui peut s'avérer incendiaire. Tant pis. J'assume.

11 commentaires:

  1. Le système carcéral... tant à dire.
    ça dépend des régions, mais généralement un mineur peut faire ce qu'il veut sans jamais passer case cabane, au pire deux mois.

    Vu l'engorgement effarant de certaines prisons, dans la pratique l'impunité due à la minorité (dans le sens "mineur") est rehaussée jusque les vingt-cinq ans, sauf récidives multiples et graves.

    À propos de l'affaire d'Agnès, l'accusé n'avait effectué comme pseudo-expertise qu'une séance de moins d'une heure - et c'est hélas conforme à ce qu'avait exigé le tribunal.
    Un peu difficile pour juger de la personnalité du prévenu. Ainsi le psychiatre s'est effectivement "trompé", mais la justice ne lui donnait pas vraiment d'autre possibilité.

    À bientôt

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  2. Je pense tout de même qu'il y a un distingo à faire entre un jeune voleur de bonbons, un ado chapardeur de MP3, un briseur de vitre à la fronde, voire même un cambrioleur et un jeune (ou moins jeune) en proie à des pulsions sexuelles morbides. Les mécanismes ne sont pas de même nature. Un jeune qui vole est un délinquant que l'on peut raisonner, qui est accessible à la morale, alors que dans le cas des pulsions sexuelles morbides la morale est abolie par celles ci. Seule compte la satisfaction immédiate.
    D'ailleurs, le vol est un délit et le viol est un crime...

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  3. Ce qui me choque c'est que tout le monde parle de la récidive et de tas de choses, mais que personne n'a l'air de trouver ça normal que ce jeune qui a en août 2010 violé une jeune fille attende toujours son procès, plus d'1 an après...
    Si son procès avait eu lieu pendant ces 4 mois de détention, il aurait été condamné.

    Qu'ils donnent des moyens aux gens de faire leur boulot !!

    Je suis côté victime , ici 1 flic de brigade des moeurs pour 50 dossiers , des expertises psys de victimes qui mettent + de 10 mois à être rédigée (enfin elle ne l'est pas encore ) etc etc etc...
    A Lyon , ville d'une amie, pour tout le tribunal d'instance, au service de copie de dossiers, il y a 1 seule personne pour TOUTES les demandes...j'en passe et des pires..

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  4. pardon c'était "que personne n'a l'air de trouver ça ANORMAL"

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  5. Tout d'abord, merci pour ce texte qui pose des questions « vraies ».
    Que dans l'instant, et surtout pour ceux qui sont proches du drame, l'émotion prenne le pas sur la réflexion, on le comprend aisément. Et d'ailleurs, pourrait-il en être autrement…
    Que les politiques au pouvoir prennent instantanément des décisions qui ressemblent à du « n'importe quoi », c'est le signe d'une faille grave de notre société où le temps médiatique, le temps de l'instantanéité prend le pas sur la réflexion, le nécessaire recul, l'analyse, et la tentative de solutions qui amélioreront « véritablement » les choses…
    Manifestement, ici, une fois de plus, et sous le sarkozysme, il n'en sera strictement rien ! On a déjà fait cinq lois pour lutter contre la récidive. Pourquoi pas une sixième aujourd'hui, une septième demain matin, une huitième après-demain…
    On le sait. C'est comme ça. Il faudra le supporter jusqu'à ce qu'on change de président… Éventuellement… Car en ce domaine rien n'est moins sûr… À faire une politique démagogique et populiste, on sait se faire réélire…

    Moi aussi je connais la justice. J'y ai travaillé. Quelqu'un qui m'est particulièrement proche est juge des enfants. Cette personne travaille pour tenter d'exercer au mieux son métier de 8 heures du matin 23 heures chaque jour. Parce qu'il faut gérer un nombre de dossiers démentiels… Passer la moitié de son temps au téléphone pour trouver une place pour un mineur délinquant qu'on a sous les yeux, finir par trouver vers 21 H,… à 300 kms de chez lui, parce qu'ailleurs tout est plein et bourré à craquer… Envoyer les flics dans la nuit le conduire là-bas… Etc. etc. J'en passe et des meilleures…
    C'est cela le quotidien ordinaire de la justice des mineurs…
    Et je ne parle pas ici des aspects strictement juridiques et judiciaires pour appliquer les lois de Sarkozy… Inapplicables faute de moyens…

    Cela ne dédouane pas des responsabilités des uns et des autres. Des erreurs possibles. Des erreurs qui se font. J'en suis plutôt à penser : comment cela se fait-il qu'il n'y en ait pas plus ! Dans de telles conditions de travail !
    On se demande même comment le système n'a pas encore explosé…

    Il faudrait que la justice des mineurs soit plus rapide ? Mais avec qui ? Avec quels moyens ? Le nombre de magistrats par habitant est en baisse constante… Et l'ensemble du système « éducatif » tient avec des bouts de ficelle…

    Alors, tenir des discours, proclamer sans cesse que si ça continue faudra que ça cesse… Prendre ses désirs pour des réalités… Cultiver la pensée magique… Ça, « on » sait faire…
    Pour se faire réélire… Ça fonctionne…
    Pour améliorer la situation sur le terrain… Sûrement pas !

    Alors oui, le meurtre d'Agnès c'est un drame !
    Mais chercher quelques lampistes, lorsqu'on est au gouvernement, afin de pouvoir dire : c'est pas moi c'est eux les responsables ! C'est aussi un drame !

    (Désolé pour ce long commentaire…)

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  6. Je suis tout à fait d'accord avec toi AlainX, sur le dérisoire des moyens de la justice et des centres divers d’accueil de jeunes délinquants ou même des victimes.
    Pour avoir travaillé quelques années dans un "foyer de l'Enfance", je sais les coups de fils au ou du proc à deux heures du matin, je sais les journées passées au tel à trouver un lieu d’accueil pour un jeune, je sais la colère de l’obligation de faire dormir un jeune dans un couloir et celle des flics qu le ramènent faute de lieu où le placer.
    Je n'ai de cesse de dénoncer les manques de moyens, humains et matériels, pour une prise en charge correcte de ces jeunes (et des moins jeunes, même)... qui, en plus de les placer dans la détresse, les place dans l'humiliation et la colère.
    Certes non tous ces jeunes ne sont pas des anges, mais il me semble que doucement parfois nous, enfin, le système, leur appuie sur la tête pour en faire des encore plus révoltés, des encore plus "à côté", des encore plus méchants qu'ils n'étaient en entrant dans le système.
    Pour une connerie, sérieuse mais pour une connerie quand même, mon fils attend depuis... 11 mois déjà en prison pour y être jugé. Comment va-t-il ressortir de là ? Qu'est-ce que lui auront apporté ces bientôt un an de détention provisoire ? De la réflexion ? ça y est, je crois qu'il sait. Du repos ? Tsss ! De l'humiliation et de la colère, surtout, de la lassitude et la presque conviction que de toute façon la vie "normale" n'est pas pour lui.
    Je suis aussi d'accord avec toi, Opale... La lenteur des procédures, la lenteur des expertises psy, la lenteur (le temps de la justice, qu'ils disent !) fabrique aussi des aberrations. Plus l'individu est jeune, plus la distance temporelle entre le délit/crime et le jugement devrait être courte. Je rencontre en ce moment un jeune qui attends depuis.... Huit mois la date de son jugement pour un vol de scooter... Il a fait une connerie, certes, mais la lenteur de la justice lui pourrit la vie depuis huit mois et pendant combien de temps encore ? Il paie, diront certains. Ok, il paie. Faut-il "payer" si longtemps pour une connerie d'un soir ?
    Bon, je m'arrête là, sinon c'est l'émotion qui va prendre le dessus... et la colère.

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  7. Sans vouloir vous offenser, votre texte n’est pas incendiaire.

    Vous glosez et amalgamez afin de justifier le fait que tous les acteurs de ce drame défendent une seule chose, leurs corporations.

    Ainsi la question de responsabilités se dissout comme le sel dans l’eau.
    Le coupable a « péché » par excès de déviance,
    Le juge a « péché » par excès de confiance,
    Le psy a péché par excès de discipline,
    Quant à la victime probablement on pourra lire entre les lignes qu’elle aura « péché » par excès d’imprudence.

    C’est bien de s’absoudre soi même et comme le dit ce bon juge cocosoc Rosenczveig, « les choses ont mal tourné ».
    On appréciera l’euphémisme comme il se doit et surtout ce défaut de conscience.

    Pour ma part, je pense que vous aurez beau déplacer le curseur des responsabilités, sur le manque de moyens, l’Ecole, la société, le système, ou même sur Dieu, il n’en reste pas moins qu’il y a des êtres irrécupérables. Et utiliser le relativisme est criminel, la preuve…

    A défaut de pouvoir les neutraliser efficacement : la prison, les médicaments, des centres de détention pour mineurs existent pour mettre hors circuit, hors d’état de nuire ces gens là.
    N’est-ce pas ce qu’on attend d’une société civilisée ?

    ComtesseÔPiedNu

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  8. Je demande à être préventivement et en préalable à mes éventuelles récidives de crimes que je pourrais potentiellement commettre, étant donné mon état psychique précaire, expédié dans une maison spécialisée avec une rivière pour pouvoir taquiner le goujon en attendant mon passage à l'acte.

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  9. Ca se tient.
    Je pense aussi qu'il faut des limites pour pouvoir se construire. Et en effet, donc l'Education et l'éducation. Si seulement parents et profs marchaient volontairement tous dans la même direction. Il serait bien aussi que les profs n'aient pas à avoir peur des parents (je ne suis pas prof).

    Je crois qu'il est difficile de voir une culpabilité en ces personnes qui n'ont pas, qui auraient dû, c'est vrai aussi. Mais ça fait toujours rager quand même (dans le vide de l'après). Je pense qu'après coup, ils se sont eux-mêmes de toute façon posé la question : "que fallait-il faire ?"
    Il ne peut pas y avoir, probablement, une seule réponse.
    C'est terrible, oui, aucun doute.







    Je lis la ligne du dessus (préventivement... éventuelles... état psychique précaire.... taquiner le goujon" et je me dis que c'est "terrible" : même dans les sujets les plus attristants, de ricochets en ricochets on peut rire et je suis "coupable", en effet, d'avoir ri.
    Y a pas idée de lire les autres aussi.
    -)





    Il y a une réelle impuissance sur ces sujets et ça c'est désespérant.
    Quand ? Pourquoi lui ? Pourquoi elle ? Pourquoi jusque là ?
    Terrible.

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  10. ps "qui auraient dû" : j'ai oublié les guillemets.

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