Les
raisons qui amènent un enfant à ne pas aimer l'école (y compris le
collège) sont nombreuses : Très mauvaise ambiance, échec
continuel, moqueries, phobie scolaire et plus généralement sociale,
timidité maladive, dégouts divers, désintérêt, racket...
Le
psy est alors parfois mis à contribution pour en dénicher les
raisons plus ou moins cachées, et tenter de faire en sorte que
l'enfant y retourne, à l'école, au besoin en aménageant un peu les
choses. La phobie scolaire existe véritablement, bien que le mot
"phobie" soit parfois un peu employé à la légère mais
bon. Le racket existe qui, s'il n'est pas dit par l'enfant racketté,
prive les parents et les adultes en général de toute possibilité
d'intervention (des enfants mettent des mois à le dire à leurs
parents, et en attendant vont à l'école la boule au ventre et la
culpabilité en bandoulière). Les mauvaises ambiances de classe,
les échecs répétés, la perte de confiance en soi et en l'adulte,
le bruit (ah ce bruit dans les classes et dans les cantines, qui
dégouttent à jamais l'enfant d'être en groupe !) sont autant de
raisons qui mènent l'enfant à ne plus vouloir aller à l'école. Et
je ne parle pas des moqueries, des vêtements pas comme ceux des
autres, de la peur -parce que expérience- du vol, etc....
Il
y a cependant une "raison" de ne pas aimer l'école que je
n'avais jamais rencontrée jusque là :
Cet
adolescent de 13 ans vient consulter, à sa demande, pour
-officiellement- "maux de ventre et vomissements" lorsqu'il
faut aller au collège. Déjà le dimanche soir il angoisse à l'idée
du lendemain. Déjà le lundi soir il angoisse et vomit à l'idée du
mardi... En fait il angoisse à l'idée-même d'aller à l'école, et
souvent vomit le matin d'école, et même pendant les cours. C'est
terrible ! Comme il me dit lui-même : Ca ne peut pas continuer
comme ça !
L'entretien
permet d'évacuer tout "problème" physique, médical, en
quelque sorte. D'autre part, la famille semble "rouler" :
Pas de conflits majeurs, pas d'événements repérables comme
traumatisant, une famille comme vous et moi, sans histoires
particulières (oui je sais, nous avons tous des histoires uniques
!). L'entretien permet aussi rapidement de savoir que cet ado est
normalement constitué, intelligent, n'est pas en échec scolaire
malgré deux années déjà de maux de ventre, de vomissements et de
dégout scolaire jusqu'au vomissement. Voilà ce qu'il permet
d'évacuer, l'entretien.
Ce
qu'il permet de découvrir, l'entretien ? Rien. Pas grand chose. Rien
de spécial. Rien qui puisse un tant soit peu expliquer ces maux de
ventre et ces vomissements.
Ce
n'est qu'au second entretien avec cet ado que pointe peut-être la
raison de son refus/malaise/dégout d'aller au collège :
L'ordinateur. Tiens donc !!! L'ordinateur, c'est la vie de ce garçon,
son bras droit, son gauche, son pilier, son bâton, son aide de camp,
son plaisir et son unique plaisir. Sans, il est mort. C'est ce qu'il
me dit : Sans ordi, je suis mort !
Parce qu'il ne vit qu'à travers ses jeux en réseau ! Parce que là
il existe [sic], parce que là il est quelqu'un [re-sic], parce que
sur les jeux en réseau il est connu, respecté voire admiré
[re-re-sic]. Wouahhh !
Re-Wouahhh
! Et s'il ne veut pas aller au collège, jusqu'à s'en rendre malade,
c'est que pendant qu'il y est, il se passe des choses sur le net, sur
le réseau, dans ses jeux... Je rate des événements, me
dit-il, quand je ne suis pas là.
Ah
ben oui... s'il passe à côté de sa vie en allant au collège, en
n'étant pas 24h/24 sur son ordi, il rate des choses, je comprends
bien. Alors par un mécanisme assez bien connu de somatisation, de
transformation de la pensée ou du malaise psychique en malaise
corporel, il a mal au ventre, vomit, accuse des baisses de tensions,
fait des malaises et tout et tout.
Alors
nous avons parlé vie, vie aussi
physique, "réelle" -même si la vie internet est aussi
de la vie réelle-, hygiène de vie, vie relationnelle, activités
autres que celle ordi, relations avec les autres, avec les parents,
intérêts des parents, éducation... En
fait, heureusement que mes parents mettent des interdits -deux
heures seulement/jour d'ordi- sinon
je crois que je ne mangerai même plus... Bienheureux
le contrôle parental.
Ce
matin, ce lundi matin de rentrée, il est allé au collège. Il a
vomit sur le trottoir du collège. Mais il y est resté toute la
journée (au collège, pas dans son vomi ni sur le trottoir). Je
savais que ce soir je venais vous voir alors j'ai tenu bon,
m'a-t-il dit.
Il
n'est pas sorti de l'auberge, comme on dit. Il est accro à l'ordi et
aux jeux en réseaux. Il veut en faire son métier plus tard, ou
[s]'engager dans
l'armée pour tuer en vrai oui je sais ce sera différent on n'a
qu'une vie, en vrai.
Il n'est pas sorti de l'auberge, il sait qu'il est accro. Mais ce
soir je crois qu'il a compris une chose, c'est que ses parents ont
bien raison de contrôler un peu les heures qu'il passe devant
l'ordi.
Me
fait un peu peur ce jeune quand même ! M'a dit qu'il pouvait
contrôler mon ordinateur à moi... de chez lui. Alors, mon
ordinateur devant lui, il a pris le contrôle de son
ordi de mon
cabinet... En me laissant entendre qu'il pouvait prendre le contrôle
de n'importe quel ordinateur dont il connait le nom du propriétaire.
Sont tombés dedans, moi je vous dis.